M. Kaesert: Histoires de collections

Titel
Histoires de collections. La collection Paul Wernert au Musée national suisse.


Herausgeber
Kaeser, Marc-Antoine
Erschienen
Zurich 2004: Schweizerisches Landesmuseum
Anzahl Seiten
48 S.
Preis
ISBN
URL
Rezensiert für infoclio.ch und H-Soz-Kult von:
Chantal Lafontant

Cet ouvrage, édité par le Musée national suisse, réunit des contributions de Marc-Antoine Kaeser, Fabienne Kunz-Brenet et Marie Poncet-Schmid, selon un concept établi par Samuel van Willigen.

Le thème de départ de la publication est la collection d’objets préhistoriques de l’archéologue alsacien Paul Wernert (1889-1972). Collecté surtout sur les rives des lacs de Neuchâtel et Constance, cet ensemble constitue un exemple significatif des collections lacustres de la fin du XIXe siècle. Exposée pour la dernière fois en 1907 à Strasbourg lors de la 38e assemblée de la Société Anthropologique Allemande, la collection sera ensuite entreposée dans la cave de la maison familiale des Wernert à Strasbourg, d’où elle ne sortira que 85 ans plus tard, à l’occasion de son rachat par le Musée national suisse. Un des grands intérêts de cette collection est donc le maintien de sa forme initiale.

L’étude se présente sous la forme d’un ouvrage de vulgarisation scientifique de 48 pages. Elle est divisée en trois parties de qualité et de longueur inégales, enrichie d'une belle iconographie comportant notamment des reproductions de photographies de Paul Wernert, de pièces de la collection ainsi que de ses lieux d’exposition.

En guise d’introduction, les auteurs rendent compte notamment des circonstances de l’acquisition de la collection, de ses qualités pédagogiques et de son intérêt pour une meilleure compréhension des usages, des goûts et des priorités de la recherche archéologique à la charnière des XIXe et XXe siècles. Ils nous livrent également des données biographiques sur son propriétaire: Paul Wernert fut durant la première moitié du XXe siècle un acteur important de l’archéologie française, qui a fréquenté les plus grands spécialistes de la paléontologie et de la préhistoire de son temps, au nombre desquels figurent Hugo Obermaier (1877-1946), Henri Breuil (1877-1961) et Pierre Teilhard de Chardin (1881-1955).

La première partie, qui est d’ailleurs la plus riche des trois, est intitulée «Collections et collectionneurs: le contexte historique, social et scientifique». Elle examine les raisons qui sont à l’origine des collections archéologiques depuis l’Antiquité jusqu’à nos jours. Une attention particulière est accordée à la naissance de la préhistoire et à son instrumentalisation au XIXe siècle. Dès 1854, des découvertes sur les rives des lacs font naître le mythe d’un «peuple lacustre» qui suscite l’enthousiasme. Les «Lacustres», avec leur habitat spécifique, sont présentés comme les ancêtres directs de la Suisse moderne. Les auteurs mettent également en exergue l’essor du marché des antiquités préhistoriques, un marché qui se développe à l’échelle internationale: durant la seconde moitié du XIXe siècle, les matériaux lacustres suisses sont en effet disséminés sur toute la surface de la planète. C’est dans ce contexte que les cantons édictent des réglementations pour éviter notamment l’exportation des biens archéologiques.

Dans la deuxième partie, le regard se porte sur la collection lacustre de Paul Wernert. La collection est composée de 2432 objets qui se rattachent en majorité au Néolithique et à l’âge du Bronze. Les outils en pierre et en silex sont les mieux représentés. Un second groupe est constitué par les objets de parure et les outils en os ou en bois de cerf, auxquels s’ajoutent des échantillons botaniques qui rendent compte du rôle pionnier des études lacustres dans l’application des approches naturalistes en archéologie. Les pièces proviennent de contextes lacustres issus d’achats successifs effectués dans différentes régions de Suisse, en France et probablement en Allemagne du Sud. Dans cette même partie, les auteurs rendent compte de quelques aspects du commerce des antiquités préhistoriques au tournant du siècle, un marché caractérisé par une extrême instabilité des prix et la prolifération des contrefaçons. Une mention spéciale est faite à l’affaire des faux des rives du lac de Neuchâtel et à l’invention d’un prétendu «âge de la Corne», une action qui sera dénoncée en 1890 par William Wavre dans le Musée neuchâtelois.

La dernière partie de l’étude engage une réflexion sur les collectionneurs d’aujourd’hui. Les auteurs ont choisi d’interroger cinq personnes – qui ont souhaité garder l’anonymat – sur leurs motivations, leurs méthodes de collecte et sur les rapports qu’elles entretiennent avec leur collection. Les ensembles concernés réunissent des centaines d’objets qui proviennent de diverses stations néolithiques et de l’âge du Bronze des lacs de Neuchâtel et de Bienne. Nos cinq collectionneurs – tous des hommes – sont issus de milieux divers. Aucun d’entre eux n’est archéologue de profession, mais leurs connaissances sont très étendues. Leurs sources d’informations sont notamment les musées et les expositions ainsi que les études.

Cette publication présente un intérêt indiscutable dans la mesure où elle concentre sur un petit nombre de pages une matière particulièrement riche et son style rend aisée la compréhension de sujets souvent pointus. On peut seulement regretter que la collection de Paul Wernert soit présentée de manière aussi succincte– la deuxième partie de l’ouvrage est d’ailleurs la plus courte des trois. On voudrait en savoir davantage sur la collection, ses modes de présentation et sur l’intérêt qu’elle a suscité auprès du public. On déplorera également que le parcours de Paul Wernert n’ait pas donné lieu à une analyse plus approfondie. Si l’on peut lire dans l’introduction que Wernert intègre en 1941, comme collaborateur scientifique, le Landesamt für Ur- und Frühgeschichte d’Alsace-Lorraine, avant de devenir en 1943 chargé de cours à l’Université de Strasbourg, les auteurs ne disent mot en revanche sur le rôle joué par la recherche archéologique pendant le IIIe Reich. Une problématique qui est pourtant aujourd’hui jugée digne d’attention par les chercheurs. C’est à un large public que doit être aussi transmis ce type d’informations délicates et non pas seulement aux spécialistes.

Citation:
Chantal Lafontant: Compte rendu de: Marc-Antoine KAESER et al., Histoires de collections. La collection Paul Wernert au Musée national suisse, Zurich, Musée national suisse, 2004, 48 p. Première publication dans: Revue historique neuchâteloise, année 143-(1-2), 2006, p. 139-140.

Redaktion
Veröffentlicht am
20.12.2010
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Die Rezension ist hervorgegangen aus der Kooperation mit infoclio.ch (Redaktionelle Betreuung: Eliane Kurmann und Philippe Rogger). http://www.infoclio.ch/
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